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Management package : attention à la requalification URSSAF

Les différentes modalités d’épargne salariale allouées aux salariés des entreprises ont fait l’objet de nombreuses réformes successives, visant à favoriser les plans bénéficiant à la collectivité des salariés et à sanctionner ceux qui ne bénéficient qu’à une petite portion de ceux-ci. Les outils d’épargne salariale ont longtemps bénéficié du régime favorable des revenus de capitaux mobiliers, et ont fini progressivement par être assimilés, pour tout ou partie, à des éléments de salaires. Et le juge social n’en est pas plus tolérant, en preuve cette décision de la Cour d’appel de Paris (CA Paris, n° 14/02741, 6 juillet 2017).

Définition des BSA et rappel de leur régime fiscal et social

Les bons de souscription d’actions (BSA) sont des titres financiers souscrits notamment à l’occasion d’une augmentation de capital / d’un rapprochement d’entreprise, permettant à son acquéreur de fixer à l’avance la quantité, la quotité, la date et le prix des actions qu’il souscrira à une date donnée. Le gain réalisé au moment de la souscription (différence entre prix de la souscription et prix de l’acquisition) est taxable en salaires, et soumis aux cotisations sociales conséquentes. La plus-value réalisée par la suite à l’occasion de la cession des titres devait normalement échapper au régime fiscal et social des traitements et salaires et être taxée en plus-value.

Les plus-values des BSA désormais soumises aux cotisations sociales ?

La Cour d’appel de Paris en matière sociale a toutefois décidé le contraire et considéré que les plus-values réalisées par les dirigeants au titre de leur BSA étaient constitutifs d’avantages octroyés en lien avec leurs fonctions, et devaient donc être soumises intégralement aux cotisations sociales.

Les juges du fond ont fait droit aux arguments de l’Urssaf en considérant, qu’en ce que (i) l’attribution du droit de souscrire des BSA avait été limitée à un nombre réduit de personnes et (ii) l’avantage avait été attribué en contrepartie du maintien des fonctions dans l’entreprise (clause de « bad leaver » intégrée dans le contrat d’investissement), les plus-values devaient intégralement être soumises à cotisations sociales.

La Cour d’appel a précisé également que la date d’exigibilité des cotisations sociales appelées sur les plus-values est fixée au moment de leur réalisation, et non l’année de souscription des BSA.

Requalification en salaires pour tous les BSA ?

Cette décision est assez surprenante et dangereuse.

Il est complexe de considérer que les plus-values réalisées à l’occasion de la cession de titres, taxables en plus-value sur le plan fiscal, soient constitutives d’un élément de salaires. A noter toutefois que la définition d’un élément de rémunération dans le code de la sécurité sociale est extrêmement large.

Les faits de l’espèce devront toutefois être mis en exergue. N’oublions pas que dans cette situation spécifique, l’attribution de droits de souscription a été limitée à une petite portion de dirigeants (dirigeants du Groupe Lucien Barrière à l’occasion de l’entrée de Colony Capital au capital du Groupe) et sous conditions spécifiques (clause de « bad leaver » ou de « good leaver » permettant de s’assurer que le dirigeant souscripteur reste en fonction jusqu’à une certaine date sans quoi il devait renoncer à ses BSA).

Cette solution, rendue en matière sociale, est pendante devant la Cour de cassation. On en espère la censure, la Cour d’appel ne s’étant effectivement pas intéressée aux conditions de rentabilité, de conservation des titres et d’octroi au prix de marché, comme on peut les retrouver dans la jurisprudence déjà bien présente en matière fiscale.

Requalification également pour les gains réalisés via d’autres outils de management package ?

Cette décision devrait dans tous les cas être cantonnée à cette espèce spécifique, l’Urssaf ayant clairement affiché dans son argumentation que ce plan échappait au cadre légal des stock-options.

Les plans d’épargne salariale (attribution gratuite d’actions, stock-options, etc.), français ou étrangers (ces derniers conditionnant effectivement l’attribution d’actions aux salariés à des objectifs de rendement dites de « good leaver »), devraient ainsi échapper à une telle requalification, dès lors qu’ils s’inscrivent dans le cadre légal restrictif des stock-options ou attributions gratuites d’actions.

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